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Un billet anglais de 50 livres à l’effigie d’Alan Turing

(Blogmensgo, blog gay du 29 juillet 2019) La Banque d’Angleterre (BoE) émettra, en 2021, un nouveau billet de 50 livres à l’effigie du mathématicien Alan Turing. Ce choix fait suite à une consultation des internautes britanniques organisée par le site web de la BoE en novembre et décembre 2018 et leur demandant de proposer des noms de scientifiques. Seules étaient éligibles des personnes décédées, scientifiques britanniques de toute spécialité à l’exception de l’économie (car Adam Smith figure encore sur les billets de 20 livres).

C’est donc le mathématicien Alan Turing qui a obtenu la préférence des internautes et de la Banque d’Angleterre pour figurer sur le prochain billet de 50 livres, l’actuel billet à effigie des thermiciens Matthew Boulton et James Watt étant promis à la démonétisation. Pas moins de 989 noms avaient été suggérés avant le choix d’une liste restreinte à 12 personnes. Turing l’a emporté sur la mathématicienne Ada Lovelace (elle aussi précurseure de l’informatique), la chimiste Dorothy Hodgkin et la biologiste Rosalind Franklin (qui a découvert, tout autant que Watson, Crick et Wilkins, la structure en double hélice de l’ADN) ou encore l’astrophysicien Stephen Hawking et les sept autres scientifiques présélectionnés.

C’est au gouverneur de la Banque d’Angleterre, Mark Carney, qu’il revenait de trancher entre les 12 finalistes. Et c’est lui qui a choisi – avec l’aide d’un panel de scientifiques – le nom d’Alan Turing, avant de révéler son choix dans la vidéo ci-après…

Le nouveau billet de 50 livres affichera un portrait d’Alan Turing, un code binaire mentionnant sa date de naissance (le 23 juin 1912), le tableau d’une de ses formules mathématiques ainsi que la phrase suivante, qu’il a prononcée le 11 juin 1949 dans une interview au Times :

This is only a foretaste of what is to come, and only the shadow of what is going to be.
Ce n’est qu'un avant-goût de ce qui est à venir, et seulement l’ombre de ce qui va se passer.
Alain Turing (1912-1954)

Les billets britanniques afficheront Alan Turing (50 £) d’ici la fin de l’année 2021. Le génial mathématicien voisinera dans les portefeuilles avec Winston Churchill (5 £), Jane Austen (10 £) et William Turner (20 £, à la place d’Adam Smith).

Alan Turing a marqué de son empreinte l’histoire de la Seconde Guerre mondiale en cassant les clés de cryptage qu’utilisaient les nazis pour coder leurs messages secrets. Cet exploit, réalisé par un mathématicien d’à peine 30 ans, aura sans doute permis d’accélérer la victoire des Alliés face à l’armée allemande. De nos jours, Turing reste considéré comme un pionnier de l’informatique et de l’intelligence artificielle, même si le « test de Turing » – faire deviner à un humain s’il converse avec un autre humain ou avec un robot – est aujourd’hui considéré comme obsolète.

Malgré son immense notoriété dans les milieux scientifiques, Alan Turing fut condamné en 1952 pour une relation homosexuelle avec Arnold Murray. La condamnation de Turing pour gross indecency (l’expression anglaise, qui n’a jamais connu de réelle définition juridique, a un sens beaucoup plus fort qu’un simple « outrage à la pudeur ») était assortie d’une obligation de traitement hormonal à base d’œstrogènes, mesure coercitive qu’aucun esprit libre, et surtout pas celui d’Alan Turing, ne saurait accepter.

Alan Turing sur un billet de 50 livres

Alan Turing s’est apparemment suicidé le 7 juin 1954 et son corps fut retrouvé le lendemain. Comme Blanche Neige revue et corrigée par Walt Disney, il aurait croqué une pomme empoisonnée (au cyanure). Mais contrairement à la jeune femme, aucun prince charmant ne lui a redonné vie par la grâce d’un baiser. Si le premier logo officiel d’Apple (une pomme multicolore croquée) fait songer à l’homosexualité et au suicide d’Alan Turing, il s’agit là d’une simple coïncidence et non pas d’un hommage (in)volontaire – tel est, du moins, le discours officiel d’Apple et du créateur du logo à la pomme arc-en-ciel.

Autre élément en phase avec la thématique de ce blog, Alan Turing a donné son nom à un procédé rhétorique, la fameuse « contrainte de Turing » imaginée par la romancière française Anne F. Garréta dans son roman Sphinx, et qui consiste à produire un texte sans que les marqueurs grammaticaux ou linguistiques ne permettent de déterminer le sexe d’un personnage ou d’un narrateur.

Pour rester dans le domaine littéraire, notons qu’une pièce intitulée La machine de Turing (dont on a parlé ici même), écrite et interprétée par Benoit Solès, aura connu un immense succès dans les théâtres français depuis sa création en 2018 et récolté pas moins de quatre molières en 2019. Ceux qui préfèrent le cinéma au théâtre auront sans doute vu Benedict Cumberbatch incarner Turing dans The Imitation Game, un film de Morten Tyldum sorti en 2014.

Le 10 septembre 2009, le Premier ministre britannique Gordon Brown présentait des excuses personnelles pour le traitement ignoble infligé par son pays à Alan Turing. Un amendement législatif visant à amnistier les gays jadis condamnés pour relations homosexuelles est entré en vigueur, le 31 janvier 2017, sous le nom de « loi Turing » et avec le soutien du gouvernement. Mais la plupart des victimes de ces condamnations injustes, à l’image d’Alan Turing, étaient mortes et enterrées depuis longtemps.

Par ses découvertes, ses travaux, son homosexualité et son amnistie, « l’héritage [de Turing] a encore des répercussions sur la science et la société aujourd’hui », a souligné Mark Carney dans un discours de présentation.

Commentaire. Mieux vaut tard que jamais… même si le choix de Turing pourrait bien se transformer en enterrement de première classe. La valeur faciale du billet, 50 livres, est telle que bien peu de Britanniques auront l’occasion de le voir et de le palper pour de vrai. Reste à savoir si la perspective d’un Brexit accéléré maintiendra l’urgence de remplacer les billets de 50 £ encore en circulation. À moins que Boris Johnson – ou son successeur – ne choisisse de faire tourner la planche à billets plus que de raison, ce qui reviendrait à dévaloriser une fois encore le doux nom d’Alan Turing.

Pour terminer sur une note plus optimiste, il faut bien reconnaître – sous réserve d’en voir le recto-verso définitif – que le design du futur billet à l’effigie d’Alan Turing est absolument magnifique. Bien plus beau que les anciens billets en livres anglaises ou en francs français, beaucoup plus élégant aussi que les eurobillets à l’esthétique douteuse. Et beaucoup plus porteur de sens, ce qui ne gâte rien.

Philca / MensGo

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