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LGBT en Inde : Bollywood s’y met aussi (un tout petit peu)

(Blogmensgo, blog gay du 21 janvier 2019) Quatre mois après la dépénalisation de l’homosexualité en Inde, l’industrie locale du cinéma et de la télévision commence à considérer des thématiques LGBT pour ce qu’elles sont : des éléments de scénario à part entière. En Inde comme ailleurs, les médias et les scénaristes ne font que refléter, d’une manière plus ou moins fidèle ou grossissante, les changements sociétaux. C’est ainsi que, pour la première fois dans l’histoire de Bollywood, un film musical à gros budget porté par un casting prestigieux s’apprête à envahir les salles de cinéma en mettant à ôtant de l’affiche une intrigue LGBT. Mais les avancées sont encore timides, voire imperceptibles, à tel point qu’il serait prématuré de croire que Bollywood se transforme en caisse de résonance LGBT ou même simplement friendly.

 

Une société un peu plus tolérante

Le premier effet de la dépénalisation de l’homosexualité par la Cour suprême indienne, le 6 septembre 2018, aura été d’une part d’encourager les gens à saisir la justice pour faire valoir leurs droits en tant que personnes LGBT, d’autre part d’encourager les juridictions de rang inférieur à statuer en faveur de ces mêmes droits LGBT. Les demandes portaient naguère sur des éléments de droit sans faire allusion à l’orientation sexuelle ou à l’identité de genre des demandeurs ; désormais, certains demandeurs n’hésitent plus à faire plaider leurs défenseurs sans cacher le statut « LGBT » des demandes.

Signe des temps, certains annonceurs – et pas que des multinationales étrangères, loin de là – n’hésitent plus à cibler la clientèle LGBTQ, soit d’une manière explicite, soit d’une manière plus implicite.

La sphère politique commence elle aussi à s’ouvrir un (tout petit) peu à des concepts moins hétéronormés. Ainsi Apsara Reddy, politicienne transgenre et journaliste de télévision et de presse écrite, a-t-elle été nommée, le 8 janvier 2019, secrétaire générale de l’All India Mahila Congress (AIMC), l’aile féminine de l’Indian National Congress (INC), formation politique de centre gauche incarnée par la famille Gandhi et aujourd’hui premier parti d’opposition en nombre de sièges à la chambre basse du Parlement (Lok Sabha). Apsara Reddy profite de sa notoriété locale et internationale pour délivrer un discours de tolérance à l’égard des personnes transgenres et de la communauté LGBT tout entière, expliquant que le fait d’appartenir à une minorité n’a rien d’anormal.

 

Vestiges de la stigmatisation ordinaire

La nomination d’Apsara Reddy est intervenue quelques jours après le vote par la chambre haute du Lok Sabha, mi-décembre 2018, de la loi de 2016 sur la protection des personnes transgenres. Reddy et son parti formulent quatre reproches majeurs à l’encontre ce texte qu’ils ont refusé de valider :

  • il se borne à une définition quasi biologique de ce qu’est une personne transgenre ;
  • il n’autorise pas les personnes transgenres à déterminer elles-mêmes leur identité de genre (elles doivent demander un certificat à une commission d’évaluation) ;
  • il n’offre pas – contrairement aux stipulations de la Cour suprême indienne – de places réservées aux minorités transgenres dans l’éducation et la fonction publique ;
  • pour toutes ces raisons, il marginalise encore plus des personnes transgenres déjà fortement précarisées.

L’un des amendements votés définit ainsi une personne transgenre :

[A transgender person is someone] whose gender does not match the gender assigned to that person at birth and includes trans-men or trans-women, persons with intersex variations, gender-queers, and persons having socio-cultural identities such as kinnar, hijras, aravani and jogta.
[Est transgenre, une personne] dont le genre ne correspond pas à celui assigné à cette personne à la naissance et inclut les hommes trans ou les femmes trans, les personnes présentant des variations intersexes, les gender-queers et les personnes ayant des identités socioculturelles de type kinnar, hijras, aravani et jogta.

Quoi qu’il en soit, le grand public s’aperçoit désormais que les relations homosexuelles ne sont pas avant tout une question de sexe, mais une question d’amour. Deux gays ou deux lesbiennes peuvent former un couple tout aussi romantique qu’un couple hétéro. De même les Indiens commencent-ils à prendre conscience que l’identité de genre et l’identité sexuelle ne sont pas gravées dans le marbre.

 

Et maintenant, du Bollywood pur queer !

Il n’en faut pas plus aux scénaristes pour adapter leurs scénarios en conséquence… et y introduire une touche plus inattendue, au moins par rapport aux habitudes des spectateurs et des téléspectateurs.

Et c’est ainsi que, dès le 1er février 2019, sort une comédie romantique de Shelly Chopra Dhar intitulée Ek Ladki Ko Dekha Toh Aisa Laga (Ce que j’ai ressenti en voyant cette fille), écrite par la scénariste transgenre Gazal Dhaliwal. En résumé, c’est l’histoire d’un jeune homme qui aime une jeune femme qui n’aime pas les hommes. La bande-annonce officielle (hindi avec sous-titrage anglais) ne dévoile presque rien de la dimension lesbienne de l’intrigue…

Le clip vantant la sortie de la bande originale du film présente une mise en scène un peu différente à partir d’images en partie identiques. Et là aussi, la dimension homosexuelle du film est quasi passée sous silence…

Il s’agit pourtant là du premier film indien très grand public, par son budget paraît-il colossal, par sa maison de production renommée (Fox Star Studios) et par son casting prestigieux (le beau Rajkummar Rao, qui aime la belle Sonam Kapoor, fille d’Anil Kapoor dans le film et dans la vraie vie), à mettre en scène une intrigue ouvertement homosexuelle, même si la bande-annonce ne le précise pas.

À peine plus explicite est le slogan du film :

Accept love for what it is.
(Accepter l’amour pour ce qu’il est.)

Le long-métrage qu’interprètent Kapoor père et fille n’est pourtant pas le premier en Inde à développer une intrigue ou des thèmes à dominante LGBTQ, tant s’en faut. Mais pour le public indien, Anil et Sonam Kapoor sont largement aussi – voire plus – populaires que Johnny Depp et Lily Rose Depp aux États-Unis, ou encore John Hallyday et Laura Smet en Europe. La différence entre un film à petit budget au casting inconnu et un film avec des stars à l’affiche, c’est l’engouement potentiel du public. Et le buzz – entretenu au plus haut niveau, depuis plus de six mois, pour ce qui concerne le film de Shelly Chopra Dhar et sa brochette de stars.

Sridhar Rangayan est un réalisateur et producteur aux thèmes LGBT beaucoup plus explicites. Il s’est fait connaître en 2006 par un court-métrage, The Pink Mirror, dont l’histoire évoque deux drag-queens, une femme transgenre et un adolescent gay. Sorti en 2018 et maintes fois primé dans des festivals, son dernier film Evening Shadows raconte les remous familiaux que provoque le coming out d’un jeune gay. La seule différence par rapport aux blockbusters de Bollywood, c’est que Sridhar Rangayan et ses films sont peu connus et n’obtiennent donc pas des médias et du grand public l’attention qu’ils méritent.

La mise au jour d’une orientation homosexuelle féminine dans le film de Shelly Chopra Dhar, masculine dans celui de Sridhar Rangayan. Peu importe, en définitive, qu’il s’agisse respectivement d’un film à gros budget et d’un film plus confidentiel. Tous les deux, par leurs œuvres respectives, ont fait avancer un pion – voire une pièce maîtresse – LGBT sur l’échiquier de la société indienne.

Philca / MensGo

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