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L’Afrique est-elle homophobe ?

(Blogmensgo, blog gay du 15 mars 2016) Des sondages menés dans 33 pays d’Afrique par le réseau indépendant Afrobaromètre/Afrobarometer montrent une relative tolérance à l’égard des personnes vivant avec le VIH-sida (68 %). En revanche, 78 % des sondés n’aimeraient pas avoir des voisins homosexuels.

Homophobie en Afrique

Avoir des voisins homosexuels ? Seuls 21 % des sondés déclarent « aimer fortement » ou « aimer quelque peu » cela, ou encore « ne pas s’en soucier ». Autrement dit, 78 % des personnes interrogées sont susceptibles de « détester fortement » ou « détester quelque peu » l’emménagement de gays et de lesbiennes à proximité de leur domicile.

infographie Afrobaromètre
21 % : à peine 1 Africain sur 5 tolère les homos. 🙁 ©Afrobarometer.org.

Pour comparaison, le taux de détestation n’atteint que 18 % à l’égard des immigrés, 12 % pour des voisins d’une autre religion et seulement 9 % à l’encontre de voisins d’une autre ethnie.

« Les questions sur la tolérance n’ont pas été posées en Algérie, en Égypte et au Soudan parce que les partenaires de recherche ont estimé que la question de la tolérance envers les homosexuels était trop sensible », prévient Afrobaromètre dans son rapport d’étude (FR, en EN et en PT). C’est dire que la moyenne d’ensemble serait encore plus homophobe si ces trois pays avaient été inclus dans l’étude.

Infographie Afrobarometer
Afrique : un continent peu tolérant. ©Afrobarometer.org.

Seuls quatre pays affichent un taux de tolérance majoritaire à l’égard des personnes homosexuelles. C’est le cas de l’Afrique du Sud, unique pays d’Afrique où le mariage gay est légal (67 %). Mais c’est le Cap-Vert qui dépasse de loin tous les autres (74 %). Deux pays d’Afrique australe complètent le quatuor de tête, le Mozambique avec 56 % de tolérance et la Namibie avec 55 %.

Le niveau d’acceptation de l’homosexualité peut sembler acceptable dans un troisième pays d’Afrique australe, le Botswana (43 %) et dans deux autres pays insulaires, Maurice (49 %) et São Tomé (46 %). Derrière ces sept pays, le taux d’acceptation chute à 26 % (Swaziland) puis à une personne sur cinq, voire moins.

Ironie du sondage, le premier et le dernier du classement se font face. L’archipel du Cap-Vert (74 %) se situe en effet au large du Sénégal (3 %), l’avant-dernier du classement avec 4 % étant la Guinée, pays frontalier du Sénégal.

Le Sénégal était jadis un pays assez tolérant à l’égard des gays et de l’homosexualité. Avec un minimum de discrétion, on ne s’y faisait jamais embêter. Mais depuis une huitaine d’années (notre article), il y sévit une vague homophobe d’une virulence peu ordinaire, dont plusieurs personnalités politiques et religieuses n’hésitent pas à tirer profit en souffrant sur les braises.

Le VIH/sida demeure stigmatisé

La tolérance à l’égard des personnes atteintes du VIH/sida atteint 68 % en moyenne, mais là aussi avec de fortes variations. Si presque un tiers des répondants (31 %) éprouvent une vraie détestation, l’avis majoritaire est quand même celui des gens pour qui le fait d’avoir des voisins séropos ou sidéens ne pose pas problème (37 %).

Infographie Afrobarometer.org
Principe de proximité : plus l'Afrique est touchée par le VIH/sida, plus elle tolère les séropos. ©Afrobarometer.org.

Le Gabon se classe septième (90 %), tandis que le palmarès de la tolérance au VIH/sida est dominé par six pays d’Afrique australe : Botswana (96 %), Namibie et Zimbabwe (94 %), Swaziland (93 %), Afrique du Sud et Malawi (91 %).

Le haut du classement, comme on le voit, inclut quelques-uns des pays les plus touchés par la pandémie.

Les trois seuls pays où le niveau de tolérance par rapport au VIH/sida n’atteint pas 30 % sont le Niger (22 %), la Sierra Leone et Madagascar (23 % chacun). Pour ces trois pays comme pour beaucoup d’autres, il semble que l’extrême faiblesse du niveau moyen d’éducation et du niveau de vie soient directement responsable d’une attitude de rejet.
(Ces trois pays figurent aussi, sans doute pour les mêmes raisons, en bas de classement pour la tolérance à l’égard des gays et lesbiennes : Niger à 5 %, Sierra Leone à 6 % et Madagascar à 12 %.)

Les autres variables susceptibles de rehausser ou d’abaisser le niveau de tolérance à l’égard du VIH/sida et de l’homosexualité sont l’âge, le niveau d’éducation et la situation géographique : les urbains de 18-25 ans ayant une formation universitaire sont très largement plus tolérants que les seniors ruraux qui n’ont jamais fréquenté l’école.

Quelques biais méthodologiques

Données objectives

Les résultats publiés le 1er mars 2016 par Afrobaromètre proviennent d’une vague d’enquêtes menées en 2014 et 2015 dans 33 pays d’Afrique. Les échantillons nationaux sont de 1.200 personnes (marge d’erreur ±3 %) ou 2.400 personnes (marge d’erreur ±2 %).

Les questionnaires étaient administrés en face-à-face et dans la langue choisie par la personne interviewée.

Carences probables

Je doute que les personnes interviewées aient pu choisir un questionnaire autre que ceux en langues occidentales ou orientales (français, anglais, portugais, arabe) ou en langues véhiculaires autochtones (swahili, bambara, mandingue) ou en langue nationale (malgache).

Au Sénégal, et en particulier en milieu rural, un « bon » questionnaire devrait pouvoir être administré en français, en wolof, en pulaar ou en sérère.

La diversité des dates d’interview et des langues de questionnaire ne facilite pas la collecte de données homogènes et directement comparables.

Quant à la phraséologie employée, du moins celle en français, autant dire qu’elle frôle le charabia. En français, les questionnaires des sondages modulent généralement la préférence et la tolérance sur une gradation allant de « tout à fait » à « pas du tout », en passant par « plutôt » et « plutôt pas ». Ainsi est-ce compréhensible par tout le monde.

Mais chez Afrobaromètre, on préfère dire « aimer fortement », « aimer quelque peu », « détester quelque peu» et « détester fortement ». Le verbe « détester » étant superlatif par nature, on ne peut donc pas détester « quelque peu ». De plus, le francophone moyen ne dit jamais « quelque peu », car ce syntagme correspond à un niveau de langage très soigné.

Enfin, mais là Afrobaromètre n’y peut rien, l’outil statistique disponible dans la plupart des pays africains laisse tellement à désirer que les sondages ne peuvent y être qu’approximatifs.

Bref, ce sondage est fait de bric et de broc, mais il a le mérite d’exister. Et, hélas ! de confirmer des choses dont on se doutait largement.

Philca / MensGo

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